Pierre Orefice et François Delaroziere souhaitent que l’Arbre aux Hérons soit habité par un bestiaire mécanique. Quoi de plus naturel que des oiseaux s’y nichent. Les deux auteurs ont donc réfléchi aux oiseaux qu’ils avaient envie de faire vivre dans l’Arbre. Bien sûr les Hérons sont en bonne place, mais des colibris y séjourneront aussi. Un aigle, une chouette ont un temps, été imaginé mais c’est bien l’idée de la nuée et du mouvement qui s’est imposée.
François Delaroziere qui puise une partie de son inspiration dans l’observation la nature a alors dessiné le Vol des oies sauvages. Pour cette machine, il s’est aussi souvenu du travail du photographe britannique, Eadward Muybridge renommé pour ses décompositions photographiques du mouvement. Il invente au XIXe siècle, la zoopraxographie, littéralement « la description de la locomotion animale ». On a tous en tête ces jouets optiques et ludiques qui donnaient à voir la décomposition du galop du cheval. Le vol des oies sauvages est en quelque sorte, une machine à décomposer le mouvement. Son mécanisme externe tel une horlogerie, aide à la compréhension du vol.
Le mobile des oies est composé de 12 oies qui dans l’arbre aux hérons formeront un V comme lorsqu’elles migrent d’un hémisphère à l’autre. Ce vol est mené par les deux premières oies fabriquées et présentées en 2018 dans la galerie des machines. Dix jeunes oies les suivent, comme le font ces oiseaux migrateurs dans la nature. À l’aéroport de Nantes Atlantique, la structure du mobile a été scindée en deux pour s’adapter aux dimensions des Halls 2 et 4 et être vue par le plus grand nombre.
Matériaux
Les corps, têtes et ailes des oies sont en bois, l’essence choisie est le cèdre. Il a une forte résistance aux intempéries et est suffisamment souple pour la sculpture. Les ailes sont aussi recouvertes pour partie de cuir. Les pattes sont en chêne. Les châssis et la structure du mobile sont en acier inoxydable. Chaque lustre à oie est équipé d’un moteur électrique qui entraîne les ailes. La masse totale de l’ensemble est de 980kg.
Mouvements
Chaque oie bat des ailes, bouge son cou de haut en bas et de droite à gauche. Le bec s’ouvre grâce à un circuit d’air comprimé qui sera effectivement mis en fonctionnement lorsque les oies rejoindront l’Arbre aux Hérons. L’ensemble des ailes battent grâce à un système mécanique de pignon-chaîne avec une roue excentrique qui transforme une rotation en translation rectiligne haut/bas.
Dans la nature, la tête des oiseaux en vol est généralement immobile et seul le corps bouge. Les oies sauvages mécaniques suivent ce même principe : c’est le mouvement du corps qui entraîne la mobilité du cou. Les ailes sont en deux morceaux avec une charnière pour l’épaule et un pantographe inversé pour le mouvement du coude qui permet un mouvement plus réaliste de l’aile.
Sculpture et peinture
Pour la sculpture des dix « jeunes » oies, les constructeurs ont démonté une des deux oies de la galerie. Ils ont ensuite utilisé un copieur de sculpture équipé d’un doigt palpeur. Cette technique n’est quasiment jamais utilisée au sein de la compagnie La Machine. Elle permet de produire des séries de pièces sous forme d’ébauche, ici les ailes, cou, bec, pattes et corps. Puis les sculpteurs ont repris chaque pièce pour les détails et les finitions. L’ensemble des 12 oies est constitué de 216 éléments de bois. Les oies sont brunes, grises, mordorées grâce à différentes teintes de jaune, rouges. Il y a également des nuances de vert émeraude et de violet. Les couleurs s’appliquent au pinceau mais le crayon et le pastel sont aussi utilisés pour donner de la nervosité à la forme. Le travail de la couleur est subtil. Il s’agit de ne pas couvrir le travail des sculpteurs et de jouer sur la transparence pour conserver les nervures du bois. Ainsi chaque couche de couleur est posée en glacis et selon l’angle de la lumière de nouvelles teintes se révèlent. Ces variations participent aussi au mouvement.
Un nouvel élément du bestiaire mécanique
Le Vol des oies sauvages rejoindra à terme le Bestiaire Mécanique de l’Arbre aux Hérons. Situé au cœur du Jardin Extraordinaire, face à la Loire, l’arche végétale de 35 mètre de haut abritera sur ses branches des jardins suspendus et des animaux mécaniques inspirés de la nature.
Une véritable cité dans le ciel.